You can be King again - Bael

HISTOIRE OU ANECDOTES

Ça vous est déjà arrivé de tout perdre ? Que la vie arrive et qu’elle rase tout derrière vous, qu’elle coupe toutes vos attaches, ou presque ? Comment vous arriveriez à vous en relever ? Est-ce que vous en profiteriez pour quitter le paysage qui vous a vu grandir, et partir vers de nouveaux horizons ? Est-ce que vous vous attacheriez à la moindre relique de votre ancien passé ? Est-ce que vous vous effondriez, incapable de vous retrouver dans vos habitudes quotidiennes, est-ce que vous essayeriez d’oublier que vous existez même ? Bael se pose souvent la question. La vie n’a pas été tendre avec lui jusque-là. Et pourtant, sans même qu’il s’en rende compte, il est toujours debout. C’est tellement dur, mais comment s’en rendre compte quand on n’a connu que ça ?

D’abord, la vie d’enfant d’immigrés japonais : évidemment que ses parents voulaient le meilleur pour lui, évidemment qu’ils ont tout fait pour qu’il s’applique à l’école, qu’il fasse un sport, et puis quand il s’est trouvé qu’il y était particulièrement doué ? Evidemment qu’ils l’ont poussé à se lancer dans une carrière professionnelle. Après tout, ici à Crucible, c’était la ville du devenir, alors évidemment qu’il devait devenir champion de sa discipline, la gymnastique.

Et Bael ? Bael aimait la gymnastique, aimait la fierté dans le regard de ses parents, bien qu’au fond il n’était pas sûr de savoir s’ils étaient fiers de lui ou de sa réussite. Gymnaste pro, donc. Le sport l’avait épargné d’une puberté trop violente, et il ne se rendit pas vraiment compte de son image qui changeait au fur et à mesure de son adolescence. Après tout, il avait plus de muscles que de formes, et sa pratique quotidienne l’empêchait de se mêler davantage aux filles de son école, d’apprendre quel type de femme il fallait être.  Il brillait autrement, à travers son art, et ça lui suffisait après tout.

N’est-ce pas ?

Tous les athlètes professionnels vous le diront : en gymnastique, on commence tôt mais on quitte également tôt. Après quelques victoires au sein de l’équipe américaine, Bael avait déjà vingt ans, et la gymnastique lui glissait déjà des doigts. Il fallait aller de l’avant, lui disait-on. Tu n’as pas le niveau pour devenir coach, et tes parents veulent que tu reviennes aux études. Ils veulent que tu aies des diplômes. Ils veulent le meilleur pour leur fille.

La fac ? Dégringolade. Le retour à la vie normale ? Bael ne reconnaissait rien. Soudainement il fallait s’inclure dans la vie normale, dans des nouveaux styles de vie, des nouvelles relations. Et la puberté qui le rattrape. Ah oui, tout à coup, il avait conscience de ses seins, de ses hanches, ses cheveux trop longs. Il perdait du muscle si vite, à rester sur les bancs de l’université, à bachoter ses cours de pharmacologie. Il déraillait si vite, jusqu’à une révélation, à force de fréquenter les groupes divers d’étudiants. Bael. Il était un garçon. Ça faisait peur, mais la réponse était si simple, quelque part. Il se sentait de plus en plus lui-même, il retrouvait une place dans ce monde qui lui paraissait si lointain.

L’ultime erreur fut peut-être de trop croire en ce que sa famille lui disait depuis sa naissance. Qu’ils ne voulaient que son bien. Qu’ils voulaient lui assurer un bon avenir. Naïvement, il crut que ça serait le cas pour cela aussi. Et son monde bascula. Là où il s’était toujours reposé sur ses parents pour avancer, soudainement il était rejeté sans aucune concession, sans aucun espoir de revenir.

Étrangement, ce fut son grand-père qui prit le mieux la nouvelle. Un grand-père qu’il n’avait pas eu le temps de connaître assez. C’est même lui qui s’occupa de sa convalescence.

Et encore une fois, la vie. Enfin, la mort. La mort qui prend tout trop vite. Qui le laisse seul, pour de bon. Seul, avec cette maison de campagne que ton grand père lui a léguée, seul sans grand amis, car le peu qu’il connaissait l’a lâché pendant sa transition. Seul, avec le potager de son grand-père. Seul, avec cette maison trop grande pour lui, trop grande pour sa peine. Et puis par le hasard des choses, parce qu’il ne peut pas vivre seul dans cette maison qu’il ne veut pas quitter, vient Simon.

Simon il est paumé, un peu comme toi Bael, mais il est plus jeune, alors tu te sens un peu responsable de lui. Simon il a Achilles, le corgi, le petit rayon de soleil qui te fait tout le temps sourire, malgré tes allergies. Simon il endure beaucoup de choses lui aussi et même si c’est toi qui au départ l’aide à se relever, il te donne un peu d’inspiration et de courage pour continuer. Tu reprends le potager de ton grand-père, tu décides de vendre des plantes médicinales et aromatiques pour survivre un peu.
Tu essayes de trouver ton chemin, de rester debout même si tu n’as plus grand-chose. Creuser ton lopin de terre et trouver ta place, voici ton destin, en tout cas c’est ce que tu penses.