unusual encounters // ty

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Gabriel a passé sa journée depuis le matin, le matin jusqu’au midi donc une moitié de journée, oui voilà - Gabriel a passé la moitié de sa journée à surfer sur les réseaux sociaux. Il est très à la page vous voyez, il n’est pas totalement en retrait de la société, vous savez. Cela fait quelque temps déjà que Gabriel, il est très impliqué dans un groupe facebook qui parle des ovnis et de la vie extra-terrestre et des preuves de la vie extra-terrestre et des preuves que les ovnis ne sont pas pour de faux. Il aime les ovnis, il aime beaucoup tout ce qui touche aux ovnis. Gabriel est un amateur émérite d’ovnis.

Sur le groupe facebook qui parle des ovnis, le groupe où Gabriel est très investi, il y’a un garçon - son pseudo fait penser à celui d’un garçon, il en déduit que c’est un garçon. Sur le groupe facebook, il y’a un garçon qui a posté, une heure plus tôt, un message invitant quiconque le souhaite à le rejoindre pour tenter de prendre contact cette nuit avec des extra-terrestres. Il est dit, quelqu’un a dit, plusieurs personnes ont dit que près de la vieille église, dans le ciel au dessus de la vieille église, il y’a des lumières. Ce sont des lumières pas très normales - c’est ce qui se dit, c’est ce que plusieurs personnes ont dit. Le garçon qui a posté sur le groupe, c’est là-bas qu’il veut se rendre, c’est à la vieille église.

Je dois y aller ! Gabriel, tout de suite, il a pensé, il a dit dans sa tête : je dois y aller !
Alors il s’est préparé comme il aime se préparer pour ce genre de grand évènement. Il s’est habillé tout en noir - ça camoufle bien le noir dans la nuit. Il a prit un sac à dos large et dans le sac à dos large qu’il a prit, il a mis une lampe torche, un carnet de notes et il a ajouté plusieurs barres chocolatés - et à boire aussi, et il a prit des allumettes aussi, et des bouts de pains. On ne sait jamais ! Et si les aliens débarquent et l’embarquent ? Et si sur le trajet dans l’ovni il a faim ? On ne sait jamais ! Gabriel est très prudent, il se dit souvent : on ne sait jamais !

Gabriel il dit beaucoup : jamais. Il aime comment sonne ce mot - ça sonne comme le lait. Il aime le lait. Jamais.

Jamais il n’avait parlé au garçon qui a posté, jamais avant aujourd’hui. C’était la première fois qu’il lui parlait - c’est un peu gênant les premières fois, surtout lorsqu’on ne connait pas, lorsqu’on est chez soi derrière un écran et pas en extérieur face à l’autre.

Tant pis pour la gêne. Prouver l’existence des aliens, ça vaut bien toute la gêne du monde - de l’univers même !

Le voilà qui marche, le nez en l’air, les mains dans les poches - il est attentif, mais pas trop. Il fait attention à ne pas être vu mais, en même temps - il ne regarde pas derrière lui. Gabriel est toujours à la fois quelque chose, à la fois quelque chose d’autre. Il marche mais il ne sait pas où ses pas se posent. Il réfléchit mais il ne sait pas où ses réflexions le mènent.

Enfin, par miracle, il arrive à destination. Les lieux sont effrayants - pierres humides et sombres, buissons brouillons, bruits de chouette et de renard, craquements de branches, aura mystique, toit pointu tout fourbu… Un décors de film d’horreur ! Il frissonne. Gabriel frissonne facilement - c’est une chiffe-molle.

Doucement, il s’avance jusqu’à la porte de l’église. Autour - pas un bruit qui ne soit pas celui que la nuit aime produire ! Le garçon aurait-il finalement choisi de ne pas venir ? Oh regarde, Gabriel, dans le ciel ! Une étoile filante ! Il sourit, de toute ses dents, si content, Gabriel sourit - il est si content. (C’est ton arcane qui te parle, abrutis !) Oui, donc ? Le garçon ? Concentre-toi !

Il observe, il se tourne. Il pose son sac. Il soupire - il songe : Je n’ai pas nourri Pigeon.
Il observe, il se retourne. Oh ! Là ! Là ! Une silhouette ! Gabriel sourit à nouveau - puis panique. Panique, panique, panique : rencontrer un humain inconnu est plus terrifiant que l’inconnu des ovnis et des aliens. Bonsoir. Gabriel. Il dit, mécanique mais pataud - un peu comme un enfant qui se prend un râteau. Il s’avance, il veut serrer une main du garçon - non, non, non. D’abord il faut sentir, il faut connaître la personne, il faut découvrir le garçon.

Gabriel il se penche près de la personne, près du garçon - il ne voit pas les traits de son visage, pas encore mais il sent, déjà il sent : son odeur, ses variations. Il inhale. Épices et sueur. Musc. Herbe mouillée. Il recule. Il met les mains dans ses poches. Le garçon a une odeur atypique. Une odeur qui te plaît, qui te déplaît - une odeur qui n’est pas équilibrée. C’est un garçon qui n’est pas équilibré. Gabriel, tes manières ! Enchanté. Les ovnis, vous en avez déjà vu ? Les aliens ? Gabriel pêle-mêle - pense par saccade, parle par charade.